
À la racine
à l'essence du quelque chose
humainement partagé aucun habitants
seulement les signes d'une présence
du linge étendu sur les balcons des vélos
désossés des verrous sans clefs et des échelles
sans pièces transversales
aucun montant seulement
des cloisons auxquelles on échappe
suites continues et décisives
le bric-à-brac de la vie
la compression des plaines ou
comment revenir au pays natal
Sous le roulis des bétonneuses
je vois des réactions en chaîne des
théories d'escalier des yeux éduqués à guetter
des compteurs surchauffés des escarbilles
oubliées sur un tamis des lessives
dans des canalisations d'eau détournée
un toboggan rouillé dans un sous-bois
et des bouteilles coincées sous la porte
qui laissent circuler l'air
Je vois aussi le pêle-mêle essuyé de dix doigts
et les empreintes que ça laisse
sur les petites bouches tues de vacarmes
À la racine
à l'essence du quelque chose
humainement partagé
je vois l'avenir fixé drôlement
quand on ne sait pas d'où on vient
Il y a dans la grammaire des villes
qui tient au principe même des êtres
de la géométrie des points de vue d’architecte
des règles et des calculs savants des affiches déchirées
des caravanes des supérettes de petits trafics
du silice et des principes instables
cherchant à se lier à d'autres possibles
Il y a au pied des barres
promises à la démolition cachée
sous le béton
le principe premier fondamental
à l’origine de la beauté
il y a le défilé des natures profondes
il y a ce qui nous distingue les uns des autres
il y a l'image d'avant les yeux
avant les mots avant le verbe
Amélie Guyot—À la racine